Les régimes de Kinshasa et de Kigali semblent être à un point de non-retour. Alors qu’un sommet conjoint de la SADC et de l’EAC s’est tenu le samedi dernier à Dar-es-Salaam, en Tanzanie, dans une tentative de désescalade, les deux États restent sur leurs gardes, prêts à s’affronter.
Si les relations diplomatiques entre les deux pays se sont totalement détériorées depuis la résurgence du M23 dans le Nord-Kivu, la situation s’est encore aggravée après la conquête de la cité de Saké par ces rebelles, suivie de la prise de Goma et de leur avancée vers le territoire de Kalehe, dans le Sud-Kivu.
Face à cette escalade, le gouvernement congolais a décidé de rompre ses relations diplomatiques avec le Rwanda, tandis que la tension verbale entre les deux parties atteint des niveaux de plus en plus préoccupants.
Non aux aéronefs rwandais dans l’espace aérien congolais
À Kinshasa, les autorités sont convaincues que le drame qui frappe l’est de la RDC est orchestré par Kigali, accusé d’armer et de soutenir le M23 dans son agression contre le territoire congolais.
Le bilan humain est catastrophique : plus de 3 000 morts en trois jours à Goma, selon les Nations unies, et une crise humanitaire d’une ampleur alarmante dans plusieurs localités du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Le gouvernement congolais tient le régime de Paul Kagame pour principal responsable de cette situation.
Dans ce contexte, Kinshasa a décidé de riposter en prenant des mesures drastiques. Par une décision rendue publique le mardi 11 février, les autorités congolaises ont interdit le survol de leur espace aérien par tout aéronef rwandais.
« Interdiction formelle de survol et d’atterrissage sur le territoire de la République démocratique du Congo pour tout aéronef civil et d’État immatriculé au Rwanda, ainsi que ceux immatriculés ailleurs mais basés au Rwanda. Cette décision est motivée par la situation d’insécurité liée au conflit armé », peut-on lire dans une note interne des autorités aéronautiques congolaises.
Une guerre sans fin ?
Les mesures adoptées de part et d’autre ne cessent d’envenimer une situation déjà explosive.
En interdisant le survol des avions rwandais, la RDC pose les jalons d’un conflit qui pourrait s’inscrire dans la durée. À chaque mesure prise par Kinshasa, souvent en guise de légitime défense, Kigali réagit en renforçant sa présence militaire sur le sol congolais, notamment par un soutien accru aux rebelles du M23.
Alors que les affrontements s’étendent désormais au Sud-Kivu et au nord du Nord-Kivu, la crainte grandit que le Rwanda mette en place de nouvelles stratégies pour faire plier les autorités congolaises.
Lors de l’assaut sur Goma, des rapports font état de l’implication directe de centaines de soldats des Rwanda Defence Forces (RDF) aux côtés du M23, avec un équipement militaire conséquent. En réaction aux récentes décisions de Kinshasa, il n’est pas exclu que le régime de Kagame adopte une approche similaire pour menacer Bukavu.
À ce rythme, la crise semble loin d’être résolue. Les perspectives de désescalade s’amenuisent à mesure que les hostilités s’intensifient, laissant craindre une guerre de longue durée aux conséquences désastreuses pour la région.
Kilemasi Muhindo