« Nous avons donné nos gisements presque pour rien ; c’était un bradage », c’est la conclusion que dresse Evariste Mabi Mulumba, Premier ministre honoraire de Mobutu, président honoraire de la Cour des comptes pendant plusieurs années, professeur d’Economie qui a réagi à cette polémique autour du contrat chinois, dit contrat du siècle en 2018, au moment de sa négociation.
Au cours d’une émission diffusée sur la Radio Top Congo, vendredi 14 avril 2023, le professeur d’Economie, Evariste Mabi Mulumba, a partagé son histoire, de ses premiers pas scolaires, à ses études universitaires à l’Université de Liège en Belgique où il a soutenu sa thèse, en passant par son rapprochement avec le Maréchal Mobulu et ses fonctions de ministre des Finances, de Premier ministre et de président de la Cour des comptes.
Réagissant à une question de Christian Lusakweno sur l’économie congolaise, avec sa cheville ouvrière le secteur minier, le professeur Mabi a effleuré la problématique du fameux contrat chinois qu’il a qualifié de “bradage des gisements de la RDC, contre presque rien en retour”.
Pour lui, le grand problème dans cette vaste convention est le fait que la RDC n’eût pas solliciter l’expertise de grands cabinets spécialisés pour l’accompagner dans les négociations. Maintenant qu’on parle de révisitation, cet économiste suggère que la partie congolaise puisse se faire assister à la table de renégociation par des techniciens si elle veut que cette dernière aboutisse à un véritable rééquilibrage des intérêts.
« Nous avons donné nos gisements presque pour rien. C’était un bradage avec notre accord. Quand on voit en détail le contrat chinois, on se demande comment peut-on signer de telles données. Le grand problème est que la RDC ne s’était pas fait accompagner des grands cabinets pour négocier dans ce domaine. On donnait comme argument, ça coûte cher ! A l’heure actuelle, on a pas cet argument parce qu’il existe au sein de la Banque Afrique de développement (BAD), il y a le département juridique qui assiste les pays qui négocient et c’est la BAD qui paye les cabinets. Donc nous n’avons pas d’excuses », a-t-il fait remarquer.
Et de poursuivre : « Si on doit corriger les choses, il faut nécessairement recourir à des cabinets qui ne coûteront pas chers pour mieux négocier. Par exemple, dans ce partenariat, on a jamais évaluer la part du partenaire dans le capital et les gisements mis à disposition. Telles que les choses se passent, c’est comme si on a donné les gisements pour rien. Vous allez voir que dans ce partenariat, on recourt à l’emprunt. Cependant, on a pas calculé la part que chacun amène ».
A une question de savoir si la cause du bradage des ressources minières de la RDC serait la conséquence du fait que le pays n’a plus de crédibilité sur le marché international, le professeur Mabi Mulumba s’inscrit en faux.
« Il y a qu’eux qui ont de la crédibilité ? Pourquoi ce sont les autres qui vendent nos gisements au lieu que ce soit nous même. Ces gisements en question, nous pouvons nous même les vendre au lieu de les brader. Vous n’avez qu’à voir un certain nombre de gisements achetés par Dan Gertler. Il achète un gisement à la GECAMINES à 50 millions USD et, cinq mois après, il le revend à 800 millions USD. Un autre problème qui favorise cette situation est la corruption qui se fait à ciel ouvert », a déclaré le professeur Mabi Mulumba.
A titre de conseil, il indique que les politiques congolais devraient absolument intégrer dans leur logiciel, la culture de la redevabilité. « On en sortira si on prend conscience. On devrait avoir un certain recul pour se poser la question de savoir, pourquoi ça ne marche pas ; quelle est la direction à prendre et taire un peu les rivalités qui ne reposent pas sur une base objective », a conclu le professeur Mabi Mulumba.