Déçu par sa coalition politique, l’Union sacrée pour la nation, alors que le M23 progresse rapidement dans l’Est du pays, Félix Tshisekedi envisage un remaniement ministériel. Cette volonté, il l’a lui-même exprimée, d’abord devant ses partisans le 22 février, puis lors du Conseil des ministres du 28 février dernier.
Des têtes pourraient donc tomber, et de nouvelles figures, notamment issues de l’opposition, devraient émerger afin de constituer un véritable front commun contre le M23.
« Le président de la République a souligné que le gouvernement aura pour mission de faire face aux agressions dont notre pays est victime, en particulier de la part du Rwanda, qui cherche à occuper notre territoire et à piller nos ressources naturelles au détriment du peuple congolais, seul légitime bénéficiaire » a déclaré Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement.
Mais qui fera partie de cette nouvelle équipe ? La question est sur toutes les lèvres. Ce gouvernement d’union nationale revêt une importance capitale, car il devra non seulement redresser la situation sécuritaire, mais aussi restaurer la souveraineté de la RDC, alors que la rébellion rwandaise contrôle déjà plusieurs territoires et deux chefs-lieux provinciaux dans le Nord et le Sud-Kivu.
Un choix stratégique pour inverser la tendance
Le président Tshisekedi devra faire preuve de discernement. Il ne peut être seul à porter cette lourde responsabilité et devra s’entourer d’hommes et de femmes engagés, capables de prendre des décisions courageuses face à l’ennemi.
Jusqu’ici, nombre de ses ministres ont montré leurs limites. Peu ont réellement contribué à la défense de l’intégrité territoriale ou à la relance du développement national. Au lieu de servir l’intérêt général, certains se sont davantage préoccupés d’enrichissement personnel ou de flatteries envers le chef de l’État, négligeant leur mission première.
Le successeur de Joseph Kabila a donc tout intérêt à être rigoureux dans la sélection des membres de son prochain gouvernement. Il doit veiller à reconduire uniquement les ministres qui jouissent d’une reconnaissance populaire en raison de leurs actions concrètes en faveur des Congolais.
Quant aux nouvelles entrées, elles devront être composées d’individus intègres, expérimentés et résolument tournés vers l’intérêt national, loin de toute ambition personnelle ou de corruption.
Différencier le bon grain de l’ivraie
Certains observateurs estiment qu’un remaniement gouvernemental ne changera pas fondamentalement la situation dans l’Est du pays. Cependant, puisque le président en a fait un élément clé de sa stratégie contre le M23, il devra procéder avec méthode et discernement.
Les choix ministériels revêtent une importance capitale à ce stade du conflit. Le gouvernement devra être inclusif pour tenir compte de la diversité politique et ethnique du pays, à un moment où la cohésion nationale est mise à rude épreuve par des divisions internes, des tensions avec l’opposition et des critiques émanant de l’Église catholique.
Aucune guerre ne peut être gagnée sans un soutien populaire fort. Félix Tshisekedi devra donc s’assurer que la nouvelle équipe gouvernementale favorise la stabilité politique et renforce l’unité nationale, en envoyant des signaux rassurants à l’opposition et aux citoyens déçus du régime. L’objectif sera de rassembler toutes les forces patriotiques pour lutter efficacement contre la rébellion.
La composition du gouvernement devra également répondre aux attentes du peuple, en mettant en avant la compétence et la probité. Il s’agira de former une équipe capable de relever les défis sécuritaires, économiques et sociaux du pays, en luttant notamment contre la corruption et en favorisant le développement.
C’est à ce prix que Félix Tshisekedi pourra regagner la confiance de la population, attirer ses adversaires politiques vers son camp et bâtir une stratégie efficace pour contrer le M23 et ses alliés.
Kilemasi Muhindo
