Avec le soutien de la Délégation de l’Union européenne et de l’ambassade d’Allemagne en République démocratique du Congo, la bande dessinée de Mme Bibiane Aningina Tshefu a été officiellement lancée ce jeudi 10 avril 2025. La cérémonie, haute en couleurs, s’est tenue dans les installations de la chancellerie allemande à Kinshasa, agrémentée par les prestations d’un groupe folklorique Tetela.

C’est au professeur Berthold Ulungu — gouverneur honoraire du Sankuru, sénateur et député national, ainsi que président de la Commission des relations extérieures de l’Assemblée nationale — qu’est revenu l’honneur de baptiser cette œuvre littéraire. L’événement a réuni de nombreux diplomates africains et occidentaux, des personnalités congolaises, des membres de la famille de l’auteure et plusieurs invités de marque.

Une œuvre pour raviver la mémoire collective

Intitulée « Lumumba, le combattant de la liberté », cette bande dessinée remet en lumière la figure du héros national Patrice Emery Lumumba, dont le combat pour l’indépendance semble parfois relégué au second plan. L’œuvre retrace le parcours exceptionnel de ce jeune homme né le 2 juillet 1925 à Onalua, dans le Sankuru, au centre de la RDC.

« Très tôt, Lumumba s’est distingué par son intelligence et son charisme, au point qu’on le surnommait Om’ote lena eheka, ce qui signifie la grande tête qui prédit l’avenir », a expliqué Bibiane Aningina, auteure de l’ouvrage.

Le silence de la mémoire collective

L’auteure souligne un contraste frappant :

« Lorsqu’on parcourt la ville de Kinshasa et d’autres grandes agglomérations du pays, on ne voit presque aucune trace de Lumumba, à l’exception du monument de l’Échangeur de Limete, d’une école et du boulevard qui portent son nom. Cela est bien insuffisant au regard de son importance historique. Alors que les Burkinabè honorent Thomas Sankara et que les Ghanéens perpétuent la mémoire de Kwame Nkrumah, notre héros national reste peu valorisé. »

Au-delà de cette revendication mémorielle, Mme Aningina plaide pour une meilleure intégration de l’histoire de Lumumba et des autres figures nationales dans les programmes scolaires.

« Par cette plaquette, je souhaite que l’enseignement de l’histoire congolaise fasse une plus grande place aux héros qui ont forgé notre conscience nationale et contribué à l’âme congolaise », a-t-elle souligné.

Appel à la jeunesse congolaise

L’auteure appelle également la jeunesse congolaise à s’approprier l’héritage idéologique de Lumumba.

« En ces temps de crise sécuritaire, notamment à l’Est du pays, il est essentiel que de nouveaux disciples de Lumumba se lèvent, animés par l’abnégation et l’esprit de sacrifice, pour penser nation avant tout. »

Soutien des partenaires internationaux

Présent à la cérémonie, l’ambassadeur de l’Union européenne en RDC, Nicolas Berlanga Martinez, a salué l’initiative.

« Il s’agit d’un droit de mémoire que nous avons voulu soutenir, même si certains passages de l’ouvrage peuvent faire débat. L’important, c’est de contribuer à cet effort de mémoire collective », a-t-il déclaré.

« Lumumba, le combattant de la liberté » est une bande dessinée de 102 pages, structurée en trois parties : l’enfance et la scolarité ; la vie professionnelle et politique ; et la fin tragique de Lumumba. Né Isaïe Tasombo Tawosa, il adopte le prénom Patrice et le nom Lumumba dès la cinquième année à l’école primaire de Tshumbe.

Portrait de l’auteure

Bibiane Aningina Tshefu est une militante congolaise de premier plan engagée pour les droits humains, la liberté et la paix. Consultante en développement social et animation socioculturelle, elle a étudié et travaillé pendant deux décennies en Afrique, aux États-Unis et en Belgique, au sein de gouvernements, d’ONG et d’agences onusiennes.

Titulaire d’un master en sciences sociales et développement communautaire, elle a notamment été conseillère du ministre de la Condition féminine en RDC, puis a travaillé avec le Comité des services africains à New York avant de réintégrer le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans la région des Grands Lacs.

Membre de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté (LIFPL) et de l’Association des femmes partenaires pour la paix en Afrique, elle mène depuis 1999 un intense plaidoyer en faveur des femmes congolaises victimes de guerre, en particulier celles ayant subi des violences sexuelles ou déplacées par les conflits.

Augustin K.