La crise sécuritaire persistante dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) prend une nouvelle tournure dramatique avec l’explosion du nombre d’enfants privés d’éducation. Selon l’UNICEF, 330 000 enfants supplémentaires ont été déscolarisés en raison des affrontements en cours entre les forces congolaises et les rebelles du M23, portant à plus de 1,6 million le nombre total d’enfants hors du système scolaire dans les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et de l’Ituri.
Face à cette situation, l’agence des Nations Unies a appelé lundi 17 février à des mesures d’urgence pour éviter une génération perdue. « La situation est catastrophique pour ces enfants », a déclaré Jean François Basse, Représentant par intérim de l’UNICEF en RDC. « C’est l’éducation – et tout l’accompagnement qu’elle offre – qui permet aux enfants de retrouver un semblant de vie normale, de se reconstruire et d’envisager l’avenir après ce conflit. »
Les écoles rouvrent, mais les enfants ne reviennent pas
À Goma, capitale du Nord-Kivu, les établissements scolaires ont officiellement rouvert le 10 février. Pourtant, la reprise des cours demeure timide : de nombreux parents, craignant pour la sécurité de leurs enfants, préfèrent les garder à la maison. L’UNICEF rappelle que l’école joue un rôle fondamental en période de crise. En plus d’assurer l’instruction, elle constitue un espace protégé contre le recrutement forcé dans les groupes armés et les violences sexuelles, tout en offrant un soutien psychosocial aux enfants traumatisés par la guerre.
Cependant, dans un contexte où plus de 2 500 écoles et espaces d’apprentissage ont été fermés depuis le début de l’année, les alternatives sont limitées. Certaines écoles ont été endommagées ou détruites, tandis que d’autres servent désormais d’abris aux déplacés internes.
Un soutien d’urgence pour éviter le pire
Pour contrer cette catastrophe éducative, l’UNICEF travaille avec ses partenaires à la mise en place d’espaces d’apprentissage temporaires et à la distribution de matériel scolaire et de kits d’hygiène. Des programmes d’enseignement à distance par radio et des cours accélérés sont également envisagés pour atteindre les enfants marginalisés.
Autre enjeu majeur : la présence de mines et munitions non explosées aux abords des écoles et dans plusieurs quartiers de Goma. L’UNICEF annonce des campagnes de sensibilisation pour limiter les risques d’accidents.
Un appel urgent à la communauté internationale
Dans le cadre de son appel humanitaire global, l’UNICEF sollicite 52 millions de dollars pour répondre aux besoins éducatifs de 480 000 enfants dans l’Est de la RDC. L’organisation exhorte également toutes les parties au conflit à respecter les écoles et infrastructures civiles, conformément au droit international humanitaire.
« Nous avons beaucoup investi dans des structures d’apprentissage dans les camps de déplacés autour de Goma, mais aujourd’hui, ces écoles sont presque vides », regrette Jean François Basse. « Nous craignons que ces enfants, déplacés à plusieurs reprises, ne retournent jamais en classe. »
Déjà sous pression avant cette nouvelle escalade, le système éducatif congolais vacille sous le poids des déplacements massifs. Actuellement, 6,5 millions de personnes, dont 2,6 millions d’enfants, ont été contraintes de fuir leur foyer.
Si des solutions ne sont pas rapidement trouvées, c’est l’avenir de toute une génération qui pourrait être compromis.
Gilbert Ngonga