L’opposant congolais et leader de la coalition Lamuka, Martin Fayulu, semble réorienter sa stratégie politique. Après l’échec de ses revendications sur la vérité des urnes en 2018 et l’inefficacité de sa dénonciation de l’illégitimité du régime Tshisekedi, le candidat malheureux de la présidentielle de 2023 appelle désormais à un dialogue national avec les forces politiques pour faire face aux défis du pays.
Fayulu mise sur la cohésion nationale, estimant que l’unité des Congolais est essentielle pour affronter les défis sécuritaires, notamment l’agression présumée du Rwanda. « Nous avons besoin de cohésion nationale pour faire face à l’agression du Rwanda et d’autres menaces. Priorisons le processus de Kinshasa, rassemblons toutes les parties prenantes autour de nos leaders spirituels, tels que la CENCO et l’ECC. L’unité est notre force », a déclaré Fayulu à l’issue d’une rencontre avec Jean-Pierre Lacroix, chef du département des opérations de paix des Nations-Unies.
Cependant, cette volonté de dialogue semble surprendre. En effet, Fayulu a longtemps refusé la main tendue de Félix Tshisekedi, affirmant qu’il ne recherchait pas des postes mais la vérité des urnes. « Je ne travaillerai jamais avec Félix. Il doit dire la vérité au peuple : il n’a pas été élu, il a été nommé », avait-il martelé à la place Sainte-Thérèse de N’djili, sous les acclamations de ses partisans.
L’opinion publique s’interroge : qu’est-ce qui motive désormais Fayulu à privilégier le dialogue, alors qu’il a toujours rejeté toute collaboration avec le pouvoir actuel ?
Les dessous du dialogue
En perte de vitesse sur la scène politique, Martin Fayulu semble chercher à réintégrer le jeu politique à travers le dialogue, un mécanisme qui, dans l’histoire de la RDC, s’est souvent traduit par un partage du pouvoir. L’opposant évoque des défis sécuritaires et sociaux, appelant à l’unité nationale. Toutefois, nombre d’analystes estiment que Fayulu, dont l’avenir politique semble compromis, cherche à se repositionner.
Fayulu, autrefois surnommé le « soldat du peuple » pour son opposition au régime Kabila, a souvent été soupçonné de collusion secrète avec Félix Tshisekedi, des accusations qu’il a toujours niées publiquement. Aujourd’hui, son appel au dialogue est perçu par certains comme une tentative de rapprochement avec le pouvoir qu’il a longtemps combattu.
Un dialogue qui divise
L’appel au dialogue lancé par Martin Fayulu divise déjà la classe politique congolaise. Le Front Commun pour le Congo (FCC) de Joseph Kabila et Ensemble de Moïse Katumbi ont exprimé leur refus. De son côté, le parti Nouvel Élan d’Adolphe Muzito a émis des réserves tout en posant des conditions claires pour sa participation à ce dialogue.
Dans un communiqué signé par l’ancien Premier ministre, Nouvel Élan a posé plusieurs questions cruciales auxquelles il est impératif de répondre avant d’engager un dialogue véritablement inclusif et efficace. Ces interrogations incluent notamment :
1. Quelle est l’opportunité de ce dialogue et quels sujets y seront abordés ?
2. Qui en seront les parties prenantes ?
3. Quelle sera l’autorité organisatrice du dialogue ?
4. Quelle sera la nature juridique des résolutions issues de ce dialogue ?
5. Comment ces résolutions seront-elles appliquées par les institutions de la République ?
Pour Muzito, un dialogue national ne pourra réussir que si ces questions fondamentales trouvent des réponses claires. Il insiste également sur la nécessité de déterminer l’opposabilité des actes issus de ce dialogue aux institutions actuelles de la République.
Blanchi Lungala