En République démocratique du Congo, le tribalisme et le favoritisme continuent de susciter des débats houleux. Le président Félix Tshisekedi est régulièrement critiqué pour ses choix politiques, accusé de privilégier sa communauté d’origine, notamment les ressortissants du Kasaï, dans la gestion des institutions publiques. Malgré les nombreuses interpellations, le chef de l’État ne semble pas ébranlé par ces reproches.
Une gouvernance sous le prisme du clanisme ?
Depuis son accession au pouvoir, Félix Tshisekedi est accusé de favoriser les membres de son groupe ethnique en leur confiant des postes stratégiques, tant à la présidence qu’au sein d’autres institutions de l’État. Cette surreprésentation de l’espace Kasaï est dénoncée par plusieurs acteurs politiques et analystes, qui y voient une menace pour l’unité nationale.
L’opposition et certains mouvements politico-militaires, à l’instar du M23, fustigent cette approche, estimant qu’elle contribue à fragiliser la cohésion nationale. De nombreux observateurs soulignent que cette tribalisation des institutions renforce davantage les divisions au sein de la société congolaise. Certains proches du président n’hésitent plus à affirmer publiquement que le pouvoir appartient désormais aux ressortissants du Grand Kasaï, excluant de fait d’autres communautés.
Face à ces critiques, plusieurs voix appellent Félix Tshisekedi à revoir son approche et à s’inspirer de ses prédécesseurs, Mobutu et Joseph Kabila, qui, malgré leurs méthodes contestées, avaient réussi à fédérer les différentes composantes ethniques du pays. Pour ses détracteurs, le président de la République doit se hisser au-dessus des considérations tribales et gouverner en tant que leader de l’ensemble du peuple congolais, et non comme le représentant d’une seule région.
Des nominations qui interrogent
Les récentes nominations annoncées le vendredi 7 mars 2025 à la télévision nationale ont ravivé la polémique. Un examen attentif de la liste des nouveaux promus révèle une forte présence de personnalités originaires du Kasaï. Mais plus encore, pour la première fois, des membres directs de la famille biologique du chef de l’État ont été intégrés à des postes stratégiques.
Parmi les noms qui suscitent la controverse figurent Christiana Tshisekedi, fille du président, nommée secrétaire particulière à la présidence, ainsi que plusieurs autres proches du chef de l’État : Jacques Tshisekedi, Mulumba Tshitoko, Tshilumba wa Kabeya, Christian Tshisekedi, et Kibassa.
Sur les réseaux sociaux, les réactions sont vives. De nombreux Congolais expriment leur indignation face à ces choix, alors que le pays traverse une crise sécuritaire majeure et que le président est censé envoyer des signaux d’apaisement à la population.
« C’est le temps du Grand Kasaï ! Hallucinant à un moment où la nation est en péril », s’insurge un internaute.
Une fracture nationale en devenir ?
Certains observateurs estiment que la RDC n’a jamais été aussi divisée depuis l’ère Mobutu. Les clivages ethniques deviennent de plus en plus visibles, au point que certaines communautés se sentent marginalisées. Des tensions émergent entre les différentes ethnies, alimentant un climat de méfiance et de ressentiment.
Le favoritisme, le clanisme et le tribalisme sont autant de maux qui gangrènent la société congolaise et risquent de compromettre l’unité nationale, à un moment où la cohésion est essentielle face aux défis sécuritaires.
L’après-Tshisekedi s’annonce incertain. Certains craignent que les communautés non kasaïennes, frustrées par ces pratiques, ne cherchent à prendre leur revanche une fois le pouvoir changé de mains. Pourtant, l’élection de Félix Tshisekedi en 2019 avait été le fruit du suffrage de tous les Congolais, et non d’un seul groupe ethnique.
Au final, l’histoire jugera si son passage au pouvoir aura contribué à unir ou à diviser davantage la nation congolaise. Mais à ce stade, nombreux sont ceux qui redoutent que son bilan ne laisse derrière lui un pays plus fracturé qu’il ne l’a trouvé.
Kilemasi Muhindo